40 000. C''est le nombre de lettres d'amour que se sont adressés Victor Hugo et Juliette Drouet. Anthea Sogno, de retour en Avignon (on se souvient encore du beau Marivaux aux couleurs d'Orient qu'elle y avait monté, il y a quelques années), a plongé dans cet océan de mots d'amour pour en faire surgir ce spectacle à deux voix, habile et sensible. On a vu fleurir, depuis quelque temps, bon nombre de pièces épistolaires, les deux protagonistes sagement assis à cour et à jardin et lisant, avec plus ou moins de pénétration, chacun sa partition. On pouvait craindre un nouvel avatar de cette forme théâtrale, très tendance. Il n'en est rien. L'intelligence de cette pièce est d'abord qu'elle en est une. De ces lettres échangées sans relâche naît un dialogue qui retrace l'histoire des deux amants dont chaque étape marquante est jouée avec entrain, humour, colère ou désespoir. Les changements de toilette, les empoignades, les embrassades se succédent sur un mode virevoltant.Anthea Sogno est une Juliette qui emporte tout sur son passage. Joyeuse et émouvante, sa générosité éclipse quelque peu son Victor, joué sur une note attendrissante par Steve Bédrossian. Au total, c'est un pari réussi. Il n'est que d'entendre le public ravi et séduit au sortir du spectacle pour en être convaincu.