Les Fourberies de Scapin comportent quelques scènes comiques d’anthologie. On pense bien sûr tout de suite à l’humour de répétition lié à la remarque obsédante : "Mais que diable allait-il faire à cette galère !". Mais d’autres scènes sont remplies d’effets comiques tout aussi efficaces : le valet qui rosse son maître, ce même Scapin qui par la suite s’excuse, publiquement, de ces coups de bâton (et qui ainsi enfonce le clou, rendant ainsi cette humiliation publique) ou encore Zerbinette qui, par "une démangeaison naturelle à faire part des contes" qu’elle connaît, raconte, "riant aux éclats", dans un délicieux quiproquo, tous les détails d’un affront à celui-là même qui vient d’en être victime.Le point commun entre toutes ces situations hilarantes ? Géronte ! Si le public rit, c’est certes grâce à l’ingéniosité de Scapin (le metteur en scène), mais peut-être plus encore grâce à Géronte (le comédien ignorant, voire la marionnette). Pour que la farce soit efficace, il est donc tout aussi important d’avoir un acteur performant pour Scapin que pour Géronte.Pari gagné pour cette production de l’Ecla Théâtre. Si Florent Favier en Scapin est virevoltant, farceur, surprenant et musiciens à ses heures, Bernard Rosselli, qui campe Géronte, est... tout le contraire ! Son honneur de patriarche qu’il ne cesse de défendre le verrait plutôt évoluer dans une tragédie cornélienne (d’ailleurs, que diable allait-il faire chez Molière?). L’opposition entre lui et le valet le plus inventif du XVIIe siècle est ainsi tout simplement savoureuse.Des colorations hispanisantes ont été choisies pour la mise en scène. Si la musique y tient une large place, le respect du texte reste une des priorités (même si au premier acte le spectateur non averti rencontre parfois quelques difficultés à bien saisir l’intrigue).La marque de fabrique de l’Ecla Théâtre est bien présente : une mise en scène inventive, des comédiens qui se régalent et nous régalent, et des effets musicaux "en direct". En gros, tout ce qu’il faut pour que le théâtre de Molière entre merveilleusement dans le cadre d’un divertissement jeune public.